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Une photo de la galerie VISAGES de PAIX
VISAGES de PAIX
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VISAGES de PAIX

Lumière sacrée


http://www.photographie.com/?pubid=103780&pag=1&secid=1&rubid=8


Un de mes amis était le conseiller financier pour un grand congrès mondial pour la paix devant rassembler 50 imams et 50 rabbins venus du monde entier qui s'engageaient d'une part au dialogue, mais surtout à condamner toute forme de violence exercée au nom de leurs textes sacrés ou au nom de Dieu, de leur dieu quoi... J'ai trouvé que c'était bien sûr une idée intéressante de faire ce rassemblement. Ils voulaient faire un livre avec les minutes de ce congrès, livre qu'ils ont d'ailleurs fait. Mais j'ai pensé que de faire un livre rassemblant les visages de tous ces religieux permettrait de donner le retentissement qu'il méritait à un tel événement, qui était une première mondiale, dans toute l'histoire on n'avait jamais vu ça... C'était né d'ailleurs du fait qu'un imam et un rabbin s'étaient serrés la main lors d'un moment difficile d'un autre congrès. On avait alors demandé aux journalistes présents s'ils allaient en parler, mais ceux-ci avaient estimé que cela n'avait guère de portée, que telle et telle personne se serre la main... Il leur avait alors été demandé si cela prendrait de l'importance au cas où ce serait 100 personnes, 50 rabbins et 50 imams qui se tendraient la main. Alors là évidemment cela deviendrait un événement. Et les gens qui avaient organisé ce premier congrès ont décidé d'organiser cet événement hors du commun.
Je me suis dit qu'on pouvait donner à cet événement un meilleur retentissement en le montrant de manière plus accessible et ainsi, peut-être, trouver une audience plus importante en en faisant un message émotionnel et visuel fort. En faisant leur portrait avec un message de paix adressé à l'humanité. Au départ ce congrès devait être fait au Maroc. En raison des difficultés avec certains extrémistes intégristes là-bas, le congrès avait dû être déplacé à la dernière minute à Bruxelles. Et à Bruxelles, c'était en plein hiver, c'était au mois de janvier, et les lumières promettaient d'être un peu grises, un peu passées, et c'est là que m'est venue l'idée de les photographier à la bougie. Et en fait, c'était une idée vraiment bien appropriée à l'événement tel qu'on voulait le retranscrire parce que cela amenait ces gens qui étaient réunis là pour des débats qui étaient parfois assez vifs quand même, des échanges difficiles, à se retrouver dans un lieu que j'avais entièrement tendu de noir, dans un lieu très calme, très paisible : avant d'y avoir accès, on parlait ensemble, ils regardaient les ouvrages que j'avais déjà faits, et on allumait les bougies, et puis comme on le voit ici, parfois nous avions une bougie d'un côté et sept ou huit bougies de l'autre, ou bien trois ou quatre bougies ici, deux-là, nous en mettions au sol, on en mettait derrière... En fait, il y avait quelque chose de très fort qui se passait avec eux, parce que je faisais tout en pose lente parce que l'éclairage était très faible, et cela les contraignait, eux, à ne pas bouger, et on se retrouvait à faire des photographies un peu comme au XIXe siècle alors que je travaillais en numérique, on se retrouvait avec des conditions de prise de vue comme si l'on n'avait pas eu un matériel capable de fixer le mouvement, etc. donc on les contraignait à une immobilité ce qui leur donne ces attitudes très intérieures, et en même temps toute cette unité dans la dignité, parce qu'on retrouve la même couleur un peu orangée sur tous les personnages, et ça les lie, par la couleur, par la lumière, on va au-delà des différences de chacun. Et il y a vraiment une unité qui se crée, par les couleurs, comme on le fait dans certaines cérémonies religieuses en Inde où les gens se jettent plein de couleur, et à la fin tout le monde a la même couleur. Et j'aimais bien aussi cet aspect d'exprimer dans les formes ce chemin de spiritualité et d'échanges et de communion et de partage qui existait entre eux, de le faire passer sur le plan de la lumière, sur le plan des formes, sur le plan de la photographie, et ça je pense que c'est le message photographique et artistique essentiel qui est passé au travers de la création de ce livre.
Parce que le concept était intéressant, il était certainement nécessaire de faire un contre-feu à tous ceux, qu'ils soient terroristes ou puissances impérialistes, qui cherchent à utiliser aujourd'hui la religion pour leur choc des civilisations, et pour leurs querelles graves de pouvoir, qui mettent en danger souvent la vie de la planète elle-même. Et ces gens-là, eh bien eux, leur message de paix est évidemment beaucoup moins spectaculaire que d'aller bombarder un pays, ou d'aller se faire sauter quelque part, mais par contre d'en faire un livre comme cela, que l'on pourrait faire circuler avec une exposition, avec ce message de paix en beaucoup de langues, avec tous ces personnages respectés par leurs communautés respectives peu connues par nous mais qui sont bien connus de leur communautés, qui prennent un risque aussi en s'engageant parce qu'ils sont critiqués par beaucoup de gens pour avoir pris cet engagement. Comme j'ai pu être critiqué moi-même, parce que l'on dit : ces gens-là, ils ne défendent pas les femmes, etc. etc. or pour moi, qui était instituteur, auparavant, quand j'avais deux enfants qui s'étaient disputés et qui n'avait cassé les pieds et avaient cassé les pieds à leurs camarades pendant une année et qui un jour avaient décidé de se serrer la main, je ne leur demandais pas en plus d'être bon en orthographe. Je les félicitais pour le pas qu'ils avaient fait en avant sur ce plan-là. Je trouve que ces gens ont fait un grand pas en avant en s'engageant dans un dialogue juif musulman à une période où ce dialogue n'est pas facile à établir, il y a de nombreuses raisons pour cela que nous connaissons tous, et en même temps c'est un contre-feu à la violence exprimée par les troupes impérialistes quand elles envahissent un pays, et qu'elles affirment leur puissance et qu'elles veulent faire taire les autres par la violence, ou ceux qui commettent des actes terroristes indiscriminés en s'attaquant à des populations parmi lesquelles pourraient se trouver leurs propres frères, puisqu'ils se font sauter sans même connaître les personnes qu'ils vont atteindre, ce n'est pas comme dans une guerre où on vise un ennemi particulier. Je trouve que ce que font ces gens-là qui sont dans la violence c'est très spectaculaire, ce que je voulais c'était qu'on ait quelque chose qui soit aussi spectaculaire sur le plan de l'émotion mais qui exprime la paix. Et j'espère qu'on y a un petit peu réussi.
POUR LIRE LA SUITE : galerie "L'Esprit des Lieux"
http://www.xavierzimbardo.com/galerie-texte-102.html

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